Quelle est la position de l’Eglise sur l’avortement ?

Je suis une élève et je me pose la question de la contraception : est-ce bien ?

Si je veux avoir une relation sexuelle dois-je utiliser la contraception, car je sais que c’est contre les principes de la religion, mais je ne veux pas avoir d’enfant à 19 ans. Si jamais je tombe enceinte, est-il correct d’avorter. J’ai aussi entendu parler que dans la religion chrétienne, il y avait plusieurs interprétations différentes sur l’avortement et la contraception, puis-je avoir plus d’information sur le sujet ? (Suite et fin)

Etudiante, 19 ans

   La question de l’avortement est aujourd’hui, surtout en France, une question très idéologique : on ne peut pas même en parler sans être accusé  d’intolérance… alors que c’est une question de société dramatique pour tous. Les femmes, évidemment, sont les premières concernées. Essayons donc d’en parler calmement : il faut, je crois, revenir à des principes fondamentaux, avant d’en tirer des conclusions.

   La question principale est celle-ci : le fœtus est-il un être humain ? Tentons donc de définir ce qu’est un humain. Qu’est-ce qui différencie un homme d’un singe, d’une fleur, d’un caillou ? Sur quels critères objectifs peut-on définir la nature humaine ? Tentons une définition biologique, génétique. La différence entre un humain et une autre espèce se trouve inscrite dans son code génétique. Pour qu’un être soit un homme, il faut qu’il possède le génome humain, et bien sûr, qu’il soit vivant. Un être humain est donc un être vivant qui possède le génome humain. De ce point de vue, un ovule à peine fécondé est un être humain.

   Passons à la philosophie. L’âme, d’après Porphyre, philosophe du IV° siècle, est ce qui sépare dans le genre matériel la matière pure du vivant. Nous prenons bien sûr ici l’âme dans le sens d’un principe de vie. Ainsi la matière se divise en animée et inanimée, et la matière animée se divise elle-même en sensible et insensible. Ce qui pose une première différence ontologique entre les plantes et les animaux (homme compris). Enfin l’animal est partagé entre rationnel (l’homme) et irrationnel (les autres espèces animales). Donc il faut voir d’après cette distinction, admise communément, en quoi le simple ovule fécondé répond à ces critères. Il est clair que le zygote, l’embryon, puis le fœtus, c’est de la matière. Quant à savoir si cette matière est animée, vivante, il suffit d’assister à une échographie pour s’en assurer ! Mais même avant ce stade, l’embryon possède le génome humain. Le fœtus est sensible, car il réagit aux sollicitations extérieures, à la musique, à la voix de sa mère, etc.

   La rationalité, la raison, ne vient que de manière progressive dans l’être humain. En fait, au sens strict, l’humain la possède dès le départ mais ne peut s’en servir de manière totale et autonome qu’à partir de ce qu’on appelle l’âge de raison. Passé cet âge, placé traditionnellement à sept ans, mais très probablement beaucoup plus tôt selon les cas, l’enfant est capable de poser un acte conscient et de savoir ce qu’il fait, et pourquoi il le fait. La notion de morale apparaît également à ce moment dans l’esprit humain. Cependant il serait absurde de dire que l’enfant, du jour au lendemain, passe du statut d’animal à celui d’humain. Un enfant, en tant que tel, est reconnu bien avant l’exercice plein et entier de son intellect, parce que l’on sait qu’il se développera dans le futur. On le sait aussi pour un embryon.

   L’enfant à naître est donc un être humain, innocent du moindre crime, qui plus est. Il est donc impensable de supprimer une innocente vie humaine, pour quelque motif que ce soit. Le cas du viol, aussi horrible et traumatisant qu’il soit, ne rend pas coupable d’une faute quelconque le fœtus issu de cette violence. Le cas du handicap diagnostiqué in utero ne rend pas le fœtus coupable de sa propre infirmité, ou alors il faudrait, comme le voulaient certains dictateurs, exterminer tous les handicapés, qui seraient coupables d’être un poids pour la société. Le cas du fœtus qui représente un danger pour la vie de la mère ne le rend pas coupable de tentative de meurtre sur la personne de sa mère. La situation peut se résumer ainsi : Il n’est jamais permis de tuer un être humain innocent. Or l’enfant dans le sein de sa mère est un être humain innocent. Donc il n’est jamais permis de tuer l’enfant dans le sein de sa mère.

   Si vous désirez une information plus détaillée, je ne peux que vous conseiller le Manuel Bioéthique des Jeunes, publié par la fondation Jérôme Lejeune, disponible gratuitement sur simple demande, en format papier ou en téléchargement.

   En conclusion, et puisque vous posez la question de la position de l’Eglise sur le sujet, je vous renvoie au Catéchisme de l’Église catholique, publié en 1992. Ce texte résume l’interdiction de l’avortement de façon limpide, en utilisant le vocabulaire des « droits de la personne », que la pensée moderne défend pourtant avec force en d’autres circonstances : « La vie humaine doit être respectée et protégée de manière absolue depuis le moment de la conception. Dès le premier moment de son existence, l’être humain doit se voir reconnaître les droits de la personne, parmi lesquels le droit inviolable de tout être innocent à la vie (n° 2270) ».